Hello !
Premier TGIF de cet automne 2015 et le constat est sans appel: on se caille salement les miches depuis 3 jours.
Hasard du calendrier ou signe de la providence, mon frère a eu le brillante idée d’aller se marier ce week-end en Provence, me permettant de me prendre pendant quelques heures pour Joe Dassin et de vivre moi aussi l’été indien.
Ayant été nommé témoin de mariage, il m’a également permis de m’essayer une nouvelle fois à cet exercice périlleux qu’est la rédaction d’un discours à prononcer devant une horde d’invités qui, pour une bonne partie, me sont parfaitement inconnus mais peuvent potentiellement être des collaborateurs, confrères, supérieurs ou même clients de celui qui vient de dire oui, et qu’il serait de bon ton de ne pas dire devant tout le monde de trop grosses conneries.
– Martin a toujours été original. Tout petit, son souci de se démarquer l’a conduit à devenir assez vite intolérant au lait. Pas encore pourvu de dents capables de manger de l’entrecôte, Martin a donc ruiné nos parents dans l’achat de couches très très épaisses et surtout nombreuses, la faute à un transit de fait très efficace…
– Alors il faut reconnaître que dans ton adolescence, tu n’étais pas le dernier pour mettre papa et maman en furie, notamment la fois où on t’a retrouvé avec la fille du voisin en train de lui faire une soufflette dans la salle de bain.
– Etudiant, Marcel était très aimé de ses petits camarades grâce à ses bons plans bringue illimités, sa générosité qui assurait à tout le monde d’avoir des bouteilles de whisky toute la soirée et son talent pour ramener toutes les bombes de la boite à sa table.
– Définitivement altruiste, Jean-Louis est tombé dans l’échangisme uniquement par souci de partage et de convivialité.
– Soucieux de sa ligne mais toujours fêtard malgré ses 35 ans, Marco a finalement troqué l’alcool pour la cocaïne.
– Avec ta gueule rongée par tous tes excès, on n’aurait jamais pensé que tu puisses trouver une femme, et c’est pour ça qu’il n’y a pas a hésité une seconde pour souhaiter une nouvelle fois à Geneviève bienvenue dans la famille. Mazel tov.
Non, on va bien se tenir. Tantôt espiègle, tantôt taquin mais toujours bienveillant, le discours prononcé par le témoin, qui plus est lorsque c’est son frère, se doit de mettre en boite gentiment le pendu sans trop le froisser, et surtout en évitant d’expliquer à sa belle-famille et à ses invités professionnels qu’ils ont affaire à un débile, alcoolique, toxico et irresponsable. N’oublions pas en plus que c’est ce mec là qui vous rince en champagne depuis le début de la soirée et qu’il serait un peu de con de se faire couper l’accès au bar pour une plaisanterie mal placée.
Son discours relatera donc son enfance sérieuse, la joie qu’il procure à toute sa famille et l’immense bonheur d’accueillir en notre seing celle qu’il a choisi pour la vie. Bref, on donnera dans le pathos et dans le coquet, une larme coulera sur la joue de la mariée et de ma grand-mère, ma mère viendra me trouver pour me dire “Tu as très bien parlé, bravo !” tandis-que mon autre grand-mère ajoutera sur un ton pénible “T’articules pas assez, j’ai rien compris. Hein Pascale, dis lui qu’il articule pas !”
Ceci dit, on rigole, mais lui au moins a réussi à trouver une femme qui veuille bien l’épouser et même lui faire deux enfants.
Je suis toujours admiratif des gens qui en arrivent jusqu’à cet acte ultime qui, s’il est tout de même moins engageant que l’achat d’un appartement ou la paternité, s’effectue devant les deux familles et les amis, Monsieur le Maire, souvent Monsieur le Curé, et coûtant la blinde.
Personnellement j’en suis loin. Entre choix hasardeux, pètages de plomb express, lassage minute ou encore d’autres néologismes synonymes de “ras le bol rapidosse sans trop savoir pourquoi alors que ça se passait bien et qu’elle était sympa”, j’ai cette fois ci opté pour une version plus colorée: la distance.
L’importation de Parisienne en terres lyonnaises est un métier à la fois dangereux et complexe. D’une parce que Lyon, pour une Parisienne pure souche, est à peu près comparable à Montluçon ou Bourgoin-Jailleu, que pour vous Paris se situe entre Tokyo et Mexico question qualité de vie, et que définitivement les gens de la capitale ont des goûts pas forcément en adéquation avec l’authenticité provinciale. Sans se faire traiter de rustique, on comprend quand même assez vite que la rue Edouard Herriot n’est pas l’Avenue Montaigne et que l’expression “change pas de main, je sens que ça vient” lancé à un patron de bistro avec l’accent dauphinois fait de vous un énorme plouc. Et que in fine on sait très bien qu’il sera extrêmement compliqué de faire descendre la Parisienne en province avec sa Smart plaquée 75, ses Louboutin et toute la panoplie pour couler des jours heureux entre Rhône et Saône. Non, ce sera au cul terreux de monter s’acquitter d’un loyer ridiculisant sourire aux lèvres le budget de l’armée américaine pour se marcher dessus dans 20 mètres carrés avec chiottes sur le pallier.
En fait la distance a ses avantages et ses inconvénients. On est toujours heureux de se retrouver et logiquement on se manque. Rarement après un mois de relation on dit à sa meuf qui vit à 300 mètres “Tu me manques chaton, j’aurai bien dormi avec toi ce soir” ponctué d’émoticônes coeur, bisou avec petit bonhomme qui rougit, lèvres et tout l’armada. Là, si.
Certes la spontanéité ne sera pas votre fort. Le texto à 18H “attends moi en bas de ton bureau, je passe te prendre et on va diner” risque d’être compliqué à mettre en place toutes les semaines, sauf évidemment si vous êtes prêts à lâcher le moitié de votre salaire dans des billets de TGV toujours plus exorbitants.
Enfin comme manifestement vous n’avez pas trouvé grâce aux yeux des indigènes de votre ville, oubliez ces menus désagrément, consultez régulièrement votre calendrier, envoyez des messages genre “Alors le week end du 22/23 je pense que je peux partir du bureau vers midi, comme ça on peut passer le vendredi aprem ensemble, puis je prendrai le train de lundi 7H. Et puis après t’auras qu’à venir la semaine suivante un soir. Et puis bon, c’est bientôt les vacances…”
C’est toujours mieux que de finir à glander sur Tinder ou sur Meetic…
TGIF les copains
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