Joyeux Noël

TGIF – Thank God It’s Friday | Joyeux Noël

by • Dec 19, 2014 • T.G.I.F.Comments (0)2595

Salut à toi, ô grand lecteur !

Cette fois nous y sommes, cernés jusqu’au cou et faits comme des rats. Ce billet est le dernier posté avant le début officiel de l’hiver, et surtout avant que le grand barbu vienne déposer ses joujoux au pied de nos cheminées désormais inutilisables en ville.

Je suis un peu comme un calendrier de l’avent à partir du 1er décembre. Toutefois ni chocolat ni pâte de fruit, je tire juste encore un peu plus la gueule tous les matins au petit-déjeuner. Mon humeur exécrable me pousse d’ailleurs à éviter de prendre des bains de foule ou à me montrer en société, ça risquerait de nuire à ma réputation d’homme charmant et tout à fait délicieux.

Le pire dans tout ça, c’est que mon coloc, d’ordinaire assez sérieux, vit en plein syndrôme de Peter Pan depuis le 1er décembre. Chez lui les fêtes de Noël agissent encore plus efficacement que la jouvence de l’Abbé Soury. Depuis 2 semaines le voilà qui sifflote, qu’il nous chante du Jingle Bell en allant pisser et qu’il me balance du “regarde comme ils sont beaux mes paquets”, ou, mieux “t’as vu tous les cadeaux qu’il y’a sous le sapin ?!” avec un air de ravi de la crèche du coup bien de saison. J’avais juré de pas le dire mais je n’y tiens pas, il lui arrive fréquemment dans la journée de me faire un petit “oh, oh, je suis le Père Noël !”. 

Enfin il y’a une bonne nouvelle dans tout ça, dans une semaine la comédie est terminée. La magie de Noël pourra enfin commencer, à savoir la visite chez notre ami le banquier pour poster le chèque de mère grand. Qu’elle soit saluée par anticipation pour sa générosité.

Enfin ne rêvons pas, si avant les chèques collectés pendant les fêtes nous permettaient de nous payer une paire de pompes, un nouveau jean, ou pour les plus chanceux un week-end quelque part, aujourd’hui ça constitue tout juste un capital de départ pour régler son loyer.

Enfin je dis ça… dans mon cas j’essaye déjà de faire un retour sur investissement et de rembourser tant bien que mal les cadeaux achetés pour les autres. Evidemment, plus on vieillit, plus on doit en faire.

Dernier rejeton d’une fratrie de 3, ayant même 9 ans d’écart avec mon frère le plus proche, il va sans dire qu’ils ne m’ont pas attendu pour se trouver une femme et faire des mioches et qu’il convient de gâter toute la smala. De plus, étant un citoyen honnête et responsable, un de mes cousins m’a fait l’honneur voici presque 10 ans de me nommer parrain de sa fille. J’ajoute beau-père, belle-mère, parents divorcés, les deux grands mères, et un cousin qui a décrété qu’on devait s’offrir un truc depuis quelques années. Ce dernier se mariant également, ça fait du monde. Dieu merci mon célibat me fait faire une économie substantielle de ce côté là, mais mon coloc, décidément toujours aussi guilleret, a déjà mis un paquet à mon nom sous le sapin, me laissant penser qu’il serait de bon goût que je lui trouve une babiole.

Je préfère être franc, et peut être dissuader certains d’entre vous qui espèreraient un jour un cadeau de ma part, je suis pas le pro du cadeau génial. Enfin tout dépend. Si vous êtes en galère de bougie, qu’un tire bouchon avec le haut en silicone vert est votre passion, qu’un “porte-capsules Nespresso” en forme de cactus en inox vous fait faire des rêves érotiques ou qu’un distributeur à savon à mettre dans vos chiottes constitue un fantasme jusqu’ alors jugé inaccessible, je suis votre homme !

Et encore, là je ne parle que des cadeaux à budgets corrects. Depuis quelques années, une mode mondiale nous fait faire des dîners de Noël entre potes. Que les choses soient dites, c’est souvent ma meilleure soirée de Noël. J’ai pas envie de me brouiller avec les âmes charitables qui me convient tous les ans à ces dîners de prestige… On connait tous l’idée de départ: chacun amène sa meilleure bouteille et un cadeau d’une valeur à peu près égale à 10€.

Je suis déjà pas bon quand il s’agit de faire un beau cadeau, imaginez le résultat quand il faut volontairement prendre un truc un peu kitsch. Si j’ai fais très fort une année en offrant à un ami une banane déstressante, sur les conseils avisés de sa copine qu’on ne nommera pas par charité, il m’est également arrivé de me voir offrir un sachet de tagliatelles… remarquez c’était utile.

Bref, tous les ans donc, nous voici à arpenter les rues à la recherche du cadeau idéal, s’imaginant dans un film américain des années 80 en train de remonter la 5ème avenue enneigée dans notre Cadillac noire sur un air de Franck Sinatra, ou “Let it snow” de Dean Martin. Pas d’emballement, nous sommes rue de Brest à Lyon, il fait 10 degrés et il pleut, la Cadillac est en fait un Vélo’v et Sinatra a été remplacé par le son de Booba qui émane de la Classe A gris mate qui stationne au feu rouge. Nous n’irons pas non plus acheter des jouets en bois chez Fao Schwarz sur Central Park mais des merdes Violetta chez Toy’s R’us de la Part-Dieu, et les petits cadeaux “décos” viendront plutôt de chez EuroDiff que de chez Macy’s.

Enfin nous serons tous réunis le 24 au soir. Sauf miracle, il n’y aura pas un concert de l’école de votre petit neveu avec une petite de 12 ans capable de vous balancer un “All I Want for christmas” comme Mariah Carey, et il serait étonnant que François Hollande soit derrière la scène en train de rouler des pelles à une assistante un peu boulotte. Remarquez, la ressemblance physique entre le président normal et Hugh Grant est aussi assez floue.

Il serait aussi assez improbable que le meilleur ami de votre mec vienne sonner à votre porte avec des pancartes pour vous faire une grosse décla. Tout comme je ne pense pas que votre petit neveu vilain et timide finisse par se lever la petite chanteuse, fantasme de toute une école du haut de ses 12 ans. La prochaine fois, promis, je ne regarderai pas Love Actually en écrivant mon TGIF.

Il n’y aura pas tout ça, on aura plutôt droit à des phrases du type “Adrien, mollo sur le champagne”, ou “Adrien, c’est bon avec le saumon la, tu vas pas dépeupler la mer d’Irlande en 10 minutes !”, et les petites blagues annuelles venant de l’autorité paternelle ne comprenant pas pourquoi je suis encore piéton à bientôt 28 piges “Adrien, j’ai pas vu ta voiture garée devant, t’es venue comment ?”. 

Encore une fois, je me réjouis d’avance de m’assoir à côté de mon cousin, notaire, ayant en revanche lui des faux airs de Hugh Grant, en apparence stéréotype de la profession libérale bourgeoise et honnête, mais jamais en retard pour recharger le verre de son cousin préféré qu’il sait en bordel pendant les fêtes, et toujours prêt à dauber sur l’ensemble de l’assemblée. Olivier, toi aussi je te remercie de ta présence par anticipation, et je sais que ta future épouse fera également une excellente convive à la table des salopards.

Impossible de terminer cet “hommage” aux fêtes de fin d’année sans une pensée pour notre grand-père qui est parti, emportant avec lui cet esprit que nous avions réussi jusque là à préserver pour Noël. Un patriarche en forme de berger, gardant son troupeau dans la discipline et dans la joie, qui nous remettait face à la vraie vie, nous expliquait ce qui était important, nous faisait rire aux larmes avec des expressions de bistro du genre “mieux vaut être dur de la feuille que mou de la branche“, enchaînant sur “je vais te dire ce qu’il y’a d’important dans la vie: gagne ton argent honnêtement, aime ta femme, aime tes enfants, gâte les avec tes moyens, choisis toi un Dieu si tu penses que ça t’aidera, sois droit dans tes bottes, et tu pourras te raser le matin en méritant qu’on t’appelle Monsieur”. 

Et si au-delà des cadeaux, des chants à la con, des sapins, des marchés de Noël Made in China, du pinard éventé de tonton Raymond et des blagues à la con de tonton Marcel, les fêtes de fin d’année ne seraient-elle pas faites pour réfléchir un peu ?

Bon, je noircis le tableau, un bon feu de cheminée, un beau sapin, des enfants qui sourient avec leurs jouets, un bon repas et de la neige avec un peu de chance… on aurait vite fait l’impression d’avoir Turn Me On de Norah Jones dans les oreilles…

Les Effrontés vous souhaitent un excellent Noël. On espère que vous serez entourés des gens qui comptent pour vous, que vous serez gâtés et que vous serez tout simplement heureux.

J’ajoute que le premier qui me dira “Noyeux Joël” sera pendu par les noyaux en haut de mon sapin.

TGIF, bonnes vacances aux petits veinards qui en ont !

Crédit Photo: mon grand-père et moi, Noël 1989.

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